Les groupes éthiques des deux hôpitaux, le Centre Hospitalier du Mans et l’Établissement Public de Santé Mentale de la Sarthe, se sont regroupés pour livrer leurs travaux sur le consentement libre et éclairé.
Ce sujet avait été brillamment abordé par le Docteur Florence Deciron-Debieuvre, chef de service du SAMU 72, devant le grand public dans le cadre des conférences du Cercle Montesquieu du Mans le 6 décembre 2014.
En tant que représentante de la société civile et présidente du Cercle Montesquieu du Mans, j'ai eu l'honneur de poser les questions du citoyen( ne) parfois bien démuni devant des textes de loi mal ou peu connus. Or notre quotidien de patient potentiel ou non, d'aidant ou de parent nous oblige à réfléchir à ce sujet.
Je vous livre le compte-rendu rédigé par M. Bernard HEGON de l’Établissement Public de Santé Mentale de la Sarthe. Une conférence qui a remporté un très gros succès. Nous continuerons à suivre les travaux des deux groupes éthiques.
Consentir aux soins : un acte libre ? Compte-rendu de M. Bernard HEGON de l'EPSM.
C'est dans les locaux de la salle des fêtes du CHM que s'est tenue la première conférence-débat organisée par les groupes éthiques du Centre Hospitalier du mans et de l'EPSM.
Le Dr Florence DECIRON-DEBIEUVRE, médecin urgentiste, a introduit cette conférence-débat en soulignant la surprise des organisateurs devant l'affluence que cette question du consentement suscitait.
En effet c'est devant une salle comble ( plus de cent cinquante inscrits) que la question de la liberté du sujet soigné à consentir a été abordée du point de vue de l'urgentiste, du gériatre, du pédiatre et du psychiatre.
La parole du "candide" a aussi pris place dans le débat par les interrogations éclairées de Nicole ANQUETIL, présidente du Cercle Montesquieu du Mans, qui anime la vie culturelle et philosophique mancelle.
La salle aussi a réagi aux différentes interventions montrant ainsi que le consentement, devenu aujourd'hui une norme dans la relation médecin/malade, n'a pas fini de faire débat.
Le consentement peut-il être autre que libre? D'un modèle paternaliste à un modèle autonomiste, acté par la loi, le patient devient co-décisionnaire de sa santé. Pourtant la contrainte de la maladie, des souffrances et des vulnérabilités qu'elle produit n'est pas sans questionner cette liberté à consentir. Comment l'information, clef de voute, de cette logique du consentement peut-elle être délivrée par les professionnels de santé? Selon quel rythme, quelle temporalité?
Les principes légaux et
déontologiques sont clairs. En pratique clinique, comment articuler l’être
pluriel, l’être sensible avec le sujet de droit ? Comment la déontologie
et l’éthique peuvent amener les praticiens à recueillir l’assentiment du
sujet ?
Le Dr Anne PAPIN évoquera plus
précisément cette question dans le cadre de l’accompagnement de la maladie
d’Alzheimer, invoquant une éthique de la responsabilité.
Ces maladies du vieillissement
empêchent la juste appréciation de ses choix. La notion du consentement libre
et éclairé est alors dévoyée. La relation soignant-soigné n’est plus duelle, l’information des proches,
des aidants et des tiers prend une part cruciale dans le parcours de vie des malades (30% des
aidants meurent avant la personne malade). Il faut penser l’autre comme un autre ‟autrement
capable”.
Après le tableau des spécificités
du consentement à l’adolescence dressé par le Dr Vincent FLURIN Pédiatre,le Dr Manuel ORSAT éclairera cette question de son regard de psychiatre, seule discipline ayant la possibilité de dispenser des soins sans consentement.
Ainsi il questionnera les interférences
de la maladie mentale dans le champ de la délibération intime amenant à la
décision de consentir. Il parlera du paradoxe entre injonction de soin et
mesure privative de liberté. Il rappellera que l’urgence, les modes sociétales
n’autorisent pas à s’affranchir du consentement. Il insistera sur la nécessité
de faire place au sujet et d’accepter de se laisser surprendre par ce qui
advient.
Cette soirée riche de réflexions
et de débats amènera les participants à s’accorder qu’entre modèle paternaliste
et autonomiste une voie tierce peut être explorée dans la rencontre de
sujet à sujet.
Bernard HEGON